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Sécurité aérienne : comment faire face au doublement du trafic d’ici 15 ans ?

Sécurité aérienne : anticiper le doublement du trafic d’ici 15 ans

3 juil. 2019 - 3 min

Plus de 70 avions décollent chaque minute dans le monde, et ce chiffre devrait encore doubler d’ici à 15 ans. Les solutions existent, technologiques et opérationnelles, pour absorber la hausse du trafic. Pour cela, Bureau Veritas conseille notamment les autorités réglementaires.

Le trafic aérien représentait 4 milliards de passagers en 2017, soit un peu plus de 10 millions de voyageurs par jour ! Et la tendance n’est pas près de fléchir car le trafic double tous les 15 ans. 

Malgré un contexte international parfois difficile, la bonne tenue des économies mondiales devrait permettre au plus grand nombre de voyager. En janvier 2018, l’Inde a ouvert 300 nouvelles liaisons intérieures ! Les vols low-cost sur les trajets longs courriers devraient se multiplier.  À l’horizon 2037, la moitié des nouveaux passagers proviendront de la région Asie-Pacifique : les liaisons qui afficheront les plus fortes croissances se situeront entre la Chine et l’Afrique (trafic multiplié par 6).

Ces chiffres sont d’autant plus impressionnants que le transport aérien doit déjà faire face à une importante congestion, au sol comme dans le ciel. Parmi les solutions possibles pour désengorger les aéroports, des avions de plus grande capacité, « mais qui sont très coûteux en basse saison », déplore Xavier Tytelman, consultant Aéronautique & Défense chez CGI Business Consulting. En revanche, des vols directs de type Bordeaux – New York, sans passer par les aéroports parisiens saturés, deviendraient enfin rentables grâce aux nouveaux modèles, plus petits et néanmoins capables d’assurer des vols de 10 heures. Quant à l’espace aérien, « on pourrait densifier en hauteur, compte tenu de la capacité des avions modernes à tenir une altitude précise ». Par ailleurs, une modernisation du contrôle aérien pourrait permettre davantage de liaisons « directes » [trajet aérien empruntant le chemin le plus court entre deux points], et ainsi de ne plus limiter les trajets à un nombre limité de lignes aériennes saturées.

La technologie permettra donc certainement d’absorber la croissance du trafic. En revanche, du point de vue de la sécurité, les enjeux sont avant tout humains.

Le casse-tête de la formation des pilotes

L’enjeu n°1 en termes de sécurité est certainement le manque de personnel qualifié : il faudrait former d’ici à 2037 plus de 600 000 pilotes et 500 000 mécaniciens dans le monde. Or le nombre de jeunes diplômés ne croît pas aussi vite que le trafic. Les avions sont, certes, de plus en plus fiables et nécessitent donc moins de maintenance – grâce, à des systèmes de contrôle qui détectent les microfissures sur une aile en quelques minutes au lieu d’une observation minutieuse, notamment. Mais cela ne suffira pas.

Du côté des constructeurs, les modèles présentent le plus de similitudes possibles afin de réduire le temps de formation nécessaire d’un appareil à l’autre. Même logique dans l’armée de l’air française : on optimise le temps de travail des instructeurs – à travers des formations plus courtes, plus simples – afin qu’ils ne soient pas trop longtemps « loin des avions ». Enfin, la téléassistance et la réalité augmentée permettront peut-être à des techniciens chevronnés d’assister à distance des confrères moins expérimentés : « le technicien indien met ses lunettes connectées, et son confrère à Toulouse, qui voit la même chose que lui, lui dit ‘voici l’écrou à débloquer’ », décrit Xavier Tytelman.

Par exemple, la plateforme collaborative MaEVA permet de réaliser des diagnostics à distance – et donc d’optimiser la disponibilité des experts, notamment grâce à la réalité augmentée.

Des performances de sécurité optimisées

Cela dit, comme le rappelle Antoine Blin, directeur de l’agence Aéronautique & Espace au sein du groupe Bureau Veritas, « la chaîne de valeur de la sécurité commence dès les constructeurs ». La flotte mondiale devrait atteindre 48 000 avions dans 20 ans contre 21 000 aujourd’hui, ce qui impose des cadences infernales aux avionneurs, à l’ensemble de leur chaîne logistique (fournisseurs de rang 1, de rang 2, de rang 3, équipementiers, sous-traitants), mais aussi aux aéroports et aux ateliers de maintenance.  « Afin que l’accélération du rythme n’affecte en rien la qualité des produits, nous intervenons en amont sur les systèmes de gestion de la qualité, et en aval sur la conformité des équipements et des infrastructures », rassure Antoine Blin. Audit des causes racines, accompagnement dans la mise en œuvre, agréments de design, sécurité aéroportuaire, conformité technique des bâtiments... toutes les étapes constituent des enjeux de niveau 1. 

Les entreprises du secteur sont d’autant plus réceptives qu’elles voient le lien entre performance de sécurité et performance opérationnelle : « en analysant les données de chaque vol [obligatoire pour tous les avions de plus de 27 tonnes], on repère des signaux faibles préventifs, et demain prédictifs, en termes de sécurité, mais aussi en termes de tendances de marché ou de consommation de carburant ! ».

La mise à niveau des pays émergents

Mais pour garantir pleinement la sécurité des passagers, il faut remonter encore d’un cran, au niveau de la supervision étatique. 

C’est pourquoi Bureau Veritas conseille également les autorités d’Aviation Civile nationales : en effectuant des tâches de surveillance des opérateurs, et surtout en accompagnant la mise en place ou l’amélioration des systèmes de surveillance. En effet, l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale) a fait émerger depuis 2009 une nouvelle forme de supervision, à la fois moins prescriptive et plus exigeante. Chaque État doit adapter ses politiques de sécurité à partir de données recueillies auprès des opérateurs aériens, et doit donc être capable d’analyser les risques, d’exploiter la « data », de formuler des mesures correctives adéquates, d’anticiper. « La transition vers ce nouveau modèle est difficile en Occident, a fortiori pour un pays qui en est encore à définir son cadre réglementaire », observe Antoine Blin.

En dépit de son slogan volontariste « no country left behind » [« aucun pays laissé de côté »], l’OACI a été forcée de constater ces fortes disparités, et travaille à un dispositif qui encadrerait et certifierait l’accompagnement des Etats et des autorités d’Aviation Civile par un tiers de confiance indépendant privé, afin d’aligner plus rapidement le niveau de sécurité aérienne d’un pays à l’autre.

Alors, attachez vos ceintures, et détendez-vous !

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