Quand Bureau Veritas vient en aide aux dauphins
Bureau Veritas assure le suivi du projet français DOLPHINFREE, cofinancé par des fonds européens et hexagonaux. L’objectif : limiter la mortalité des dauphins, induite par les activités de pêche dans le golfe de Gascogne. Explications.
À l’origine du projet, un constat implacable : la première cause de mortalité des mammifères marins dans le monde est liée aux prises de pêche accidentelles. Et les dauphins sont particulièrement concernés. Ainsi, dans le seul golfe de Gascogne, entre la Bretagne et le Pays basque, l’échouage de dauphins a significativement augmenté depuis 2016. Un pic a été atteint au cours de l’hiver 2019-2020, avec environ 10 000 victimes estimées dont la grande majorité est due à l’impact de la pêche professionnelle.
Depuis quelques années, un scientifique passionné par ces espèces animales réfléchit aux moyens d’élaborer une solution technologique à même de résoudre, en grande partie au moins, ce douloureux problème. Son nom ? Bastien Mérigot, maître de conférences à l’université de Montpellier, au sein du département d’enseignement biologie-écologie de la faculté des sciences et du centre de recherche « Biodiversité marine, exploitation et conservation ».
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Avec le soutien de différents partenaires (1), il a ainsi mis en œuvre le prototype d’un dispositif fondé sur les connaissances bioacoustiques et cognitives du dauphin.
Premier élément du dispositif : émettre, lors des opérations de pêches et via des balises installées sur les filets, un signal compréhensible et interprétable par le dauphin grâce à son système naturel d’écholocalisation. Il lui indique la présence d’un filet et donc, d’un risque de mortalité associé.
Second élément : créer un système de récupération d’énergie présent sur la balise (hydrolienne et panneaux solaires) pour augmenter l’autonomie du dispositif. Le dispositif inclut également un module d’écoute passive, développé dans le cadre du projet LICADO, qui identifie la présence de dauphins et déclenche alors l’émission du signal acoustique.
S’assurer de la conformité du protocole
« Le prototype que nous avons ainsi mis au point constitue une première mondiale, souligne Bastien Mérigot. Par rapport aux systèmes répulsifs qui étaient souvent appliqués jusque-là, il présente en outre l’avantage d’informer les dauphins de la présence d’un danger sans pour autant les effrayer. »
Restait à assurer un suivi du projet et des tests, assurés pendant la plupart des mois de l’année et notamment en hiver, par les bateaux de pêche.
L’université de Montpellier a donc choisi Bureau Veritas, en 2020. La mission portait à la fois sur la mise en œuvre du protocole prévu par le programme DOLPHINFREE par les marins pêcheurs volontaires pour participer aux tests et, selon la situation, sur le constat de non-capture ou sur la documentation du cas de capture observé (photos, vidéos, relevés biométriques, etc.). « Outre la qualité de la prestation proposée, le fait que Bureau Veritas dispose déjà d’une expérience dans le domaine du suivi d’activités de pêche pour la préservation des mammifères marins a joué en sa faveur », explique Bastien Mérigot.
« Dans le cadre d’un projet comme celui-ci, financé à 80% par les FEAMP (Fonds européens pour les affaires maritimes et la pêche) et à 20% par FFP (France filière pêche), la plus grande rigueur est évidemment de mise, insiste Étienne Jarry, chef de projet Bureau Veritas. Les ONG impliquées dans la protection de l’environnement, notamment dans la préservation des espèces animales menacées, ont besoin d’être rassurées à la fois sur l’indépendance des observateurs et sur la qualité du travail mené. Tout comme les pouvoirs publics ! »
Une implication forte de tous les acteurs
Ainsi, parmi les douze observateurs Bureau Veritas intervenant dans cette zone, quatre sont dédiés spécifiquement au programme DOLPHINFREE. Ils embarquent régulièrement à bord des bateaux, pour des missions et des tests d’une durée variable : d’un jour pour les fileyeurs côtiers à une semaine pour les navires hauturiers. À l’arrivée, leurs rapports et comptes rendus viennent alimenter la banque de données de l’université de Montpellier et d’Aglia (Association du grand littoral atlantique).
« L’implication de nos observateurs, de profils très divers, est à la mesure de celle dont font preuve tous ceux qui sont associés au projet, souligne encore Étienne Jarry. Qu’il s’agisse des pêcheurs – tous volontaires –, des fournisseurs de matériels ou de services associés, comme Octech, ou d’organismes qui encouragent une culture responsable de la pêche sur toute la façade Atlantique, comme Aglia : la volonté commune de limiter le plus possible la mortalité des dauphins induite par les activités de pêche est très forte ! »
La mission de Bureau Veritas, qui a débuté il y a un an, a été ralentie en raison de la crise sanitaire. Mais elle va se prolonger cette année au-delà de la période hivernale, et sans doute jusqu’à la fin de 2022. Les premiers retours sont encourageants : les observateurs Bureau Veritas n’ont eu à constater que peu de captures accidentelles de dauphins.
(1) Le projet est porté par l’université de Montpellier (UM), avec le centre de recherche Biodiversité marine, exploitation & conservation MARBEC (UM, CNRS, IRD, Ifremer), en collaboration avec le LIRMM (laboratoire d’informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier – UM, CNRS), l’UMS PELAGIS (université de la Rochelle, CNRS), l’Ifremer de Brest, OCTECH, AGLIA, Les Pêcheurs de Bretagne, et avec la contribution de l’association Conscience Dauphins.